jeudi 27 mars 2014
On 3/27/2014 by Unknown in NUMERO-NOVE
Il y a quelques semaines, alors
que le Milan AC malmenait la Juventus à San Siro, Carlos Tevez, d’une bastos du
droit sous la barre, offrait la victoire aux siens. Hier, face à Parme, l’Apache
a signé les deux buts de son équipe face à Parme lors de la victoire 2-1 des « bianconeri ». Quatorze points d'avance sur la Roma et Capocanoniere[1] de la Serie A. Si Tevez répond présent sur les pelouses d’Italie
et d’Europe, il y a de fortes chances qu’il
soit le grand absent de l’évènement sportif de l'année 2014, la Coupe du
Monde au Brésil. Mais alors pourquoi ?
Pourquoi ? et surtout comment se passer d’un joueur qui
change le jeu sur une touche de balle, une accélération, une frappe ? un joueur qui a
juste besoin de renifler le cuir pour vous faire vivre des moments aussi magiques que spectaculaires comme cette
frappe de mule contre le Milan dont on vous parlait en introduction. Et comme tant d’autres moments dans une carrière atypique. Le genre de joueur que tous les sélectionneurs rêveraient
d’avoir au sein de leurs effectifs. Tous, sauf un, Alejandro Sabella. Malgré l’évidente grande forme de
l’Apache, flèche rouge et plus affûté que jamais, le patron de l’Albiceleste a décidé de se
passer des services de Carlitos et ce, depuis qu’il a succédé à Batista en 2011. Bien
qu’ayant claqué 19 buts en 39 matchs avec la Juventus, force est de constater
que le sélectionneur argentin s'en fiche royalement. D’ailleurs, il l’a
encore boycotté de sa liste pour le match amical face à la Roumanie. Il s'agissait là des derniers rodages avant l’annonce de la liste finale, en mai.
Tevez, ce super joueur, ce buteur
hors-pair, cet amoureux de son pays, bien plus populaire que Messi en
Argentine, mais aussi, et surtout, une forte personnalité. C’est d’ailleurs
davantage pour sa personnalité que pour ses talents de footballeur que ça
bloque. Bien que peu décisif dans les éliminatoires de la Coupe du Monde, Diego
Maradona décide que Tevez sera du voyage en Afrique du Sud. C’était il y a 4
ans. Rien d’étonnant quand on sait l’amour de la légende Diego pour l’Apache, qui comme lui, a refusé de tomber dans
la pauvreté à Buenos Aires et qui comme lui, a brillé pour Boca Juniors. Et ça,
l’Argentine adore.
Mais une débâcle en Afrique du
Sud vient remettre en question la position de l’ex-avant-centre de Manchester
City, qui malgré sa bonne forme en club, ne séduira pas Batista. Ce
dernier préférant tout miser sur Messi, reproduire le modèle du FC Barcelone et
préparer sa tactique en fonction de la Pulga, qui n’était pas vraiment aussi
bien perçu dans son pays qu’aujourd’hui. (On lui reprochait d’être plus européen
qu’argentin et de peiner à reproduire ses performances catalanes en sélection).
De son côté, Tevez avait ouvertement protesté contre la mise à l’écart de
Maradona et l’arrivée de Batista, ce qui pouvait expliquer son écartement. Sauf que
le peuple argentin et les hommes forts du pays ont milité pour un retour de l’Apache
en sélection pour la Copa America 2011 organisée par l’Argentine. Mais en quart
de finale, face à l’Uruguay, Tevez rate son pénalty et l’Argentine est éliminée.
Quelques semaines plus tard, aura lieu le clash public avec Roberto Mancini face au Bayern
en Ligue des Champions où il refuse de rentrer en jeu. Sabella n’en demandait pas temps. Arrivé en 2011 à la
tête de l'Albiceleste, il boude complètement l’Apache, le jugeant
incontrôlable.
Sabella, Tevez est argentin !! (sache-le) |
Les raisons de Sabella de
boycotter l’idole de Boca sont nombreuses. Tout d’abord, suite à l’altercation
avec Mancini, Tevez avait voulu raccrocher les crampons avant de finalement s’engager
pour la Juventus. Un souhait qu'il avait déjà exprimé il y a quelques années. A l’âge de 26 ans, et à
l’époque chouchou d’Old Trafford, il avait signifié à Ferguson qu’il lui
restait 4 ans avant d’arrêter sa carrière. Pour un sélectionneur qui cherche à
construire une équipe et remporter des trophées, il est difficile de compter
sur l’instabilité d’un joueur sur le plan mental.
L’abondance d’attaquants de
qualité et les nombreuses options possibles sont tant de raisons pour
lesquelles il devient facile d’ignorer un Tevez en forme. Puis il y a la
hausse soudaine du niveau de jeu affiché par Messi en sélection depuis la
nomination de Sabella. Souvent critiqué pour donner plus à son club qu’à son
pays, « La Pulga Atomica » a rapidement inversé la tendance et les
opinions négatives à son sujet en claquant 21 buts depuis
le changement de sélectionneur. Des performances qui ont permis à l’Argentine
de survoler les éliminatoires pour le Mondial brésilien et surtout, qui ont
permis à Sabella de négliger la pression politique autour des non-sélections de
Tevez. Qu’il soit plus populaire que le quadruple Ballon d’Or n’est un secret
pour personne, mais le coach a décidé de baser sa tactique autour de Messi et
depuis son regain de forme, les résultats sont là. Il faut aussi noter que les
deux joueurs ne sont pas très complices sur le terrain malgré un respect mutuel
évident qu’ils éprouvent l’un pour l’autre.
L'autre problème, c’est qu’il n’y a
pas que Messi. Le choix est large devant avec des joueurs intouchables comme
Gonzalo Higuain, Sergio Aguero, Ezequiel Lavezzi, Angel Di Maria puis il y a d'autres joueurs qui sont aussi dans les papiers de Sabella comme Rodrigo Palacio, Erick
Lamela, voire Ricky Alvarez, Diego Milito ou Javier Pastore qui peuvent aussi postuler à une place
dans la liste des 23. Autant de joueurs qui éclipsent l’absence de l’Apache. Il existe une option
qui serait d’utiliser Carlos comme un joker de luxe mais encore une fois est-ce compatible
avec sa personnalité de rester cloué sur la touche ? Certainement pas. Il
avait ouvertement exprimé son mécontentement après avoir chauffé le banc d’Old
Trafford trop longtemps et son refus d’entrer en jeu face au Bayern avec les
Citizens vient confirmer les faits. L’Apache ne rentre pas, il démarre.
Alors certes, Sabella a de
nombreuses raisons de l’esquiver et pour
le moment les résultats parlent pour lui, mais Carlos Tevez semble plus
que jamais à son aise en Italie et ses performances sur le terrain chaque
semaine nous rappellent qu’il s’agit là d’un buteur hors-pair. Malgré un passé
trouble et les nombreuses polémiques, sa forme actuelle devrait lui garantir un
billet pour Copacabana, mais ce ne sera pas le cas.
La face d'un bâtiment du quartier de "Fuerte Apache", en Argentine. |
Avec un Zlatan Ibrahimovic
éliminé, un Falcao blessé, l’absence de Carlos Tevez sera un autre coup dur
pour les amoureux du football. À 30 ans, déjà, c’est probablement la dernière
chance pour l’Apache de représenter son pays dans le plus grand tournoi du
monde. Une véritable tragédie pour ce patriote. Oui, car Tevez est un héros. Héros
de turin où il enchaîne les buts et surtout héros de Fuerte Apache, son
quartier en Argentine, où on peut voir son portrait sur une peinture murale
géante (voir ci-dessus) qui inspire de nombreux jeunes à renoncer à la pauvreté et à la drogue
et à croire en ses rêves, comme lui l’a fait. Pour eux, il est le « jugador
del pueblo », le joueur du peuple, on le vénère plus que tout autre joueur
de l’équipe actuelle. Il y aura Diego Maradona, et l'Apache, Carlos Tevez.