dimanche 23 février 2014
On 2/23/2014 by Unknown in ANCIENS
2 mars
2002, Patrick Vieira, la liquette
des Gunners collée aux pecs, remonte le ballon sur quelques mètres au centre du
terrain et le donne à Robert Pires, côté gauche, un classique à l'époque.
Pires, l'ex "Tonton Flingueur"
du F.C Metz avec Cyril Pouget, toujours dans les bons coups à l'époque,
transmet le ballon à Dennis "The
Menace" Bergkamp aux abords de la surface. C'est à ce moment là que
tout s'arrête. Le temps, le stade, les supporters, tout. L'enfant d'Amsterdam
va marquer un but d'anthologie. Le genre de but que l'on aime raconter encore des années, voire des décennies plus tard.
Dos au but à l’entrée des seize, le Néerlandais s'emmène le ballon, faisant au passage un amour de grand pont sur son adversaire du soir, malmené. En direct, tout le monde pense alors que le génial Dennis s'est servi de son exter' du droit pour inscrire cet incroyable but. Mais pas du tout, après ralenti, on s'aperçoit que c'est bien d'un intérieur magistral que Bergkamp mystifie son défenseur puis cruficie d'un plat du pied serein le portier adverse. Un but de dingue.
Dennis Bergkamp c’était aussi ça. Les nouvelles
générations connaissent les Messi, Ronaldo, Ibrahimovic, Suarez. Qui sont fantastiques
et de vraies machines à marquer. Mais des buteurs de cette classe, de cette
finesse, il n’en existe presque plus. Bergkamp n'a jamais terminé une saison à
plus de 30 buts mais c’était un des grands artisans du Arsenal des invincibles.
C’est devenu une légende en Angleterre et à Londres, si bien qu’on lui a érigé
une statue qu’il a découvert cette semaine. Héros.
Le
meilleur tosma d’Amsterdam.
Qui était donc Dennis Bergkamp ? Un génie au
talent intemporel. Pas géant, bien que de grande taille, Dennis a plus le
profil du gentil cadre néerlandais que du footballeur surdoué. Sa carrière de
footballeur démarre à l'Ajax à l’âge de 11 ans.
A l'époque ce club est un grand fleuron et une
véritable référence en formation néerlandaise et européenne. C'est l'illustre
Johan Cruijff, alors entraineur de l'équipe première qui le fait monter en
équipe première à l'âge de 17 ans. Après trois saisons à 0,20, 0,43 et 0,32 buts
par match, il claque 25 pions en 33 matchs en 1990/91 et 24 en 30 matchs
l'année d'après. Sa dernière saison à Amsterdam est un récital et il parvient à
mettre 26 buts en 29 matches soit un ratio de 0,93 buts par match, le meilleur
de sa carrière. L’Europe commence à sentir l’odeur de ce matos dont tout le
monde parle et tout le monde veut l’avoir. C’est finalement à Milan que
Bergkamp évoluera. Il rejoint l'Inter.
Période
mitigée à l'Inter
A l'époque, la Serie A est de loin le meilleur
championnat du monde. L'Inter vient de finir deuxième, juste derrière son grand
rival, l'AC Milan. La première saison de Bergkamp sera décevante en terme de
but mais il remporte la Coupe de l'UEFA 1993. Sauf que l’Inter est
méconnaissable en championnat, la saison est compliquée, Bergkamp marque huit
buts en 31 matchs. La saison suivante sera encore pire les Nerazzuri et pour
Bergkamp dont le ratio de but par match descend à 0,14, le plus bas depuis ces
débuts professionnels. Les italiens se lassent d’un matos qui ne les a pas
convaincu. Bergkamp est vendu à Arsenal , l'été 1995, pour une dizaine de
millions de livres. Bergkamp arrive revanchard à Londres. Et le talent va faire
le reste.
Un tosma
qui va murir et envoyer Londres au septième ciel.
Alors certes, à ce moment là, Arsenal n'est pas "the best place to be" en
Angleterre. C'est encore le "Boring
Arsenal". La nouvelle version du championnat anglais appelée Premier
League est encore jeune et
la plupart des équipes pratiquent encore le bon vieux kick and rush, dégueu et souvent efficace, mais si pénible pour les
yeux. Eh oui, Lee Dixon, Martin Keown ou Tony Adams ne sont pas des enfants de
coeur ! Pourtant c'est bel et bien avec eux que The Non Flying Dutchman (référence des supporters d’Arsenal à sa
phobie de prendre l'avion) remportera le
championnat quelques années plus tard.
Pour sa première saison, Bergkamp claque un but
tous les trois matches et Arsenal finit à la 5ème place du classement, sept
places de mieux que l'année suivante même si c'est insuffisant pour accrocher la
Ligue des Champions. Mais dès cette première année outre-manche, Bergkamp ravit
déjà les supporters par son élégance et son intelligence de jeu. Il n'est pas
seulement buteur, il marque et fait marquer les autres. L'arrivée d'un jeune
entraîneur français va faire définitivement décoller sa carrière.
Arsène
le découvre et va tomber complètement accro.
Arsène débarque à Arsenal en provenance de Nagoya,
au Japon, après une modeste carrière de joueur passée entre Mulhouse et
Strasbourg. Une nouvelle ère pour Arsenal et Bergkamp commence. Pendant dix ans,
il va vivre les plus belles années de sa carrière sous la houlette du Français.
Mais aussi entouré d'autres grands joueurs comme Patrick Vieira, Freddie
Ljunberg ou encore Thiery Henry.
« Dennis est le meilleur joueur avec qui j'ai joué en tant que coéquipier. Pour un buteur c'est le rêve de l'avoir dans l'équipe avec lui » Thierry Henry
Vous l'avez bien compris, Bergkamp n'était pas juste
un simple buteur. Encore aujourd'hui, quand on regarde ses vidéos sur YouTube,
son toucher de balle épate, sa vision de jeu illumine, sa classe éblouit. Il voit aussi arriver à la toute fin des
années 90, début 2000, les frenchies
dont Wenger raffole. Mais ces frenchies
là, contrairement à ceux d'Alan Pardew à Newcastle actuellement, sont très
performants. Ils s'appellent : Emmanuel Petit, Patrick Vieira, Robert Pires,
Sylvain Wiltord ou encore Thierry Henry, bien sûr. Et c’est avec ce dernier
que Bergkamp va prendre énormément de
plaisir sur le terrain et avec qui il formera l’un des meilleurs duos
d’attaquants que l’Europe ait connue. Ce numéro neuf est aussi convertible en neuf et demi, avec son mental de winner, une mentalité
et un caractère à toute épreuve. Il laissera volontiers le rôle de buteur à Henry, ce qui ne l'empêchera pas de marquer également.
Son deuxième but pour Arsenal contre Southampton, en septembre 1996, était déjà un bijou du genre : une conduite de balle tout en rythme et en technique et aux 23-24 mètres, une superbe frappe du droit qui vient se loger en pleine lucarne. Des buts, Bergkamp va en claquer cent vingt. Des réalisations bien souvent étayées d'un coup du sombrero, d'une talonnade, d'un petit pont ou encore juste une frappe pure dont il avait le secret. Du haut de ses 120 buts, Bergkamp peut frimer, mais ça sera mal connaître le bonhomme.
Dans ces 120 pions, il y en a un paquet qui sont venus
d'ailleurs. Comme ce magnifique enroulé du droit contre Leicester, en août 1997, suite à une passe en retrait d'un
autre Oranje, Marc Overmars. Parce
que si Thierry Henry est devenu maître en matière de frappe du droit enroulé
petit filet, sa "spéciale", Dennis Bergkamp n'y est pas étranger.
Il remportera avec Arsenal : trois Premier
League, trois Community Shield et trois FA Cup. Un passage de 11 saisons remplies
de succès pour le Batave qui laisse une trace indélébile de son passage à
Arsenal et dans le mythique stade d’Highbury. Il jouera son dernier match en
finale de la Ligue des Champions, le 1er juin 2006 au Stade de France. Triste
pour un joueur qui n'aura pas eu la chance de remporter la coupe aux grandes oreilles.
Notons aussi que niveau prestige encore, Bergkamp finit respectivement 3ème au
Ballon d'Or 1992, fermant la marche derrière Hristo Stoïchov et Marco Van
Basten et 2ème l'année suivante derrière l'italien Roberto Baggio.
Le matos
du pays.
Bergkamp en séléction c'était aussi du grand art. 37 caramels en 79 sélections, une statistique
qui a fait de lui le meilleur buteur de l'Histoire de la sélection
néerlandaise avant que Patrick Kluivert ne lui succède. Hall
of Fame quand même.
Les débuts de Bergkamp en séléction se font contre
l'Italie le 26 septembre 1990. C'est le début d'une aventure qui durera 10 ans
jusqu'à la défaite en quart de finale contre l'Italie à l'Euro 2000, le 29 juin
de la même année. Malgré une génération très prometteuse, avec des joueurs qui
deviendront des champions dans leurs clubs respectifs comme les frères De Boer,
Cocu, Davids, Seedorf, Overmars ou Kluivert, cette séléction néerlandaise ne
gagnera aucun trophée. Pire elle ne parviendra même pas à se qualifier pour la
Coupe du Monde en Corée au Japon en 2002. Dommage, mais Bergkamp est parvenu a
enfiler les buts comme des perles et chose rare, à devenir prophète en son
pays. Nous avons choisi deux de ses buts les plus marquants lors de la Coupe du
Monde en France.
20 juin 1998, Marseille. Dernier
match de poule contre la Corée du Sud. Bergkamp comme souvent, se construit le
but seul. Après un contrôle orienté, il mystifie ses adversaires avec un double-contact avant de finir avec un bon vieux pointard. Un chef d'oeuvre de fluidité. Les Pays-Bas s'imposeront
5-0.
4 juillet
1998, Marseille, encore. Les
Pays-Bas disputent les quarts de finale sous une chaleur phocéenne écrasante. A la 89ème minute, c'est la tentative de la dernière chance : de son
camp à gauche , Franck De Boer décoche une transversale de 80 mètres millimétrée
qui arrive sur Bergkamp. Le reste est un rêve : contrôle en porte-manteau, qui,
dans la même fraction de seconde fait petit pont sur Almeyda puis frappe coup
du pied lucarne opposée, clouant Carlos Roa au pilori. La sélection Oranje est qualifiée pour les demies. Énorme,
le Batave vient de claquer le plus beau but du tournoi et probablement l’un des
plus beaux dans une phase finale de Coupe du Monde. Dans le même match il se
met en quatre, presque à terre, pour délivrer un fabuleuse déviation au jeune
Patrick Kluivert de la tête au point de pénalty, qui n'a plus qu’à la pousser
du droit.
Si on ne devait garder de Bergkamp qu'un adjectif qualificatif, cela serait "élégant". Car c'est par son
élégance que Dennis Bergkamp est sorti du lot et s'est révélé aux yeux du monde
comme un esthète du football.
Après avoir passé ses diplômes d'entraineur, il
est actuellement adjoint de Franck De Boer à
l’ Ajax. Sa science et sa vision de jeu sont de bonne augure pour sa
carrière d’entraineur. Même si un grand joueur ne fait pas forcément un grand
entraîneur, on se doute que ce matos venu tout droit d’Amsterdam n’a pas fini
de nous faire kiffer.
Gabriel Fabre
Vous pouvez suivre l’auteur sur Twitter : @FabreGabriel